Racontez une histoire à votre public !

Notre cerveau n’est pas programmé pour comprendre une logique ou retenir des faits pendant longtemps, mais pour comprendre et retenir des histoires d’où l’utilisation du storytelling pour marquer les esprits. C’est ce qu’a conclu Véronique Boulenger, chercheuse en science de la cognition du Laboratoire Dynamique du Langage.

Le storytelling est un outil de communication utilisée par les entreprises et les personnalités politiques afin de créer un lien avec leur public. Elle consiste en l’élaboration d’une stratégie de communication ou de marketing narrative qui va permettre de faire passer les valeurs, les missions et les conflits au public cible. Son importance vient de la tendance des gens à s’attacher à une marque pour les idées qu’elle véhicule et non seulement à l’efficacité et au prix des produits et services.

Cet outil de communication peut être élaboré de plusieurs manières : lors d’un discours, d’un film d’entreprise, d’un événement ou un communiqué ou dossier de presse. La variété des méthodes ne dépend que de votre budget !

Comment créer un bon storytelling

Pour créer une bonne histoire il faut lui donner un sens donc une cause et sa conséquence. De cette causalité né le conflit. Cette cause va être amenée par un désir, une envie irrépressible qui aura ses adversaires et ses oppositions. Ces derniers sont les obstacles à franchir. Toute la dramatisation vient du doute que ressentira le public quant au dénouement.

Dans la communication, le sens est donné par les valeurs et les missions, le sens de l’existence d’une organisation. Le conflit sera souvent le manque ou le besoin qui a fait naître le produit ou le combat d’une association.

Pour trouver un conflit, les pistes sont multiples. Par exemple le conflit prend sa source de la découverte d’une vérité qui dérange, le combat pour une cause juste, la remise en question d’une idée ou alors une situation perturbante.

Un bon début pour ouvrir les portes sur un storytelling est de trouver des réponses aux questions des “5W”: who? What? Where? When? Why?.

“Qui” pour le héros et les protagonistes ; “quoi” est une intrigue ; “où” et « quand » posent le décor ; et “pourquoi” est la raison du héros, un rêve.

“Lorsqu’il s’agit de storytelling nous devons nous comporter exactement comme un showrunner (auteur de série télévisée chargé d’encadrer l’équipe de scénaristes tout au long de l’écriture, pour assurer la cohérence des différents éléments de l’oeuvre), chargé de veiller au bon déroulement de l’histoire, au cours de sa conception et de sa réalisation. A chaque point de contact entre la marque de son public, nous devons nous assurer que les petites idées mises en place sont au service de la grande idée générale, en cohérence avec la vision, la mission et la méthode que nous lui avons attribuées. » Guillaume Lamarre

Dans ces paragraphes Guillaume Lamarre explique qu’une campagne de communication se servant du storytelling est similaire à la production d’une série télévisée et que chaque contact avec le public est l’équivalent d’un épisode. Le showrunner qui peut être le directeur de la communication doit s’assurer de la cohérence du message tout au long de la création.

Les 5 caractéristiques d’une bonne histoire »

1. Simple

Le pitch de la narration doit être simple et ne doit comporter qu’une seule idée. Nous devons garder à l’esprit la démonstration que doit faire l’histoire. Le storyteller se doit de faire preuve d’empathie quant au public qu’il veut toucher. La transmission du message, son champ-lexical dépendra du public.

2. Surprenante

“Si vous connaissez la façon dont votre héros va s’en sortir avant même de vous être mis à écrire, je vous garantis que votre public le devinera également.” David Mamet.

Ici l’écrivain David Mamet nous parle du dénouement et du sentiment de curiosité que doit ressentir le public pendant la narration. Il doit y avoir un sentiment de relâchement, de soulagement lors du dénouement.

Pour surprendre le public on peut se servir de cet outil utilisé lors de campagne de marketing ou de communication “AIDA” (attention, intérêt, désir, action). Le procédé est aussi utilisé pour surprendre. Le procédé est le parti-pris de l’auteur comme par exemple une conversation en messagerie instantanée, le point de vue d’un animal présent dans la scène.

Il faut créer une alternance entre tension et relâchement. Pour chaque élément de réponse apporté, nous devons retrouver une nouvelle question. C’est ce qui donne envie au public de savoir la suite. Ce procédé question qui apporte une réponse pour apporter une autre question s’appelle le “cliffhanger”. Procédé bien connu dans le domaine du cinéma et maîtrisé par Stanley Kubrick par exemple dans son film “L’odyssée de l’espace” où le personnage principal se retrouve projeté dans une autre dimension où se trouve un vieil homme puis le héros prend la place de ce vieil homme qui dans la scène suivante se retrouve dans le corps d’un vieil homme dans son lit de mort et la dernière scène nous montre un bébé regardant la terre depuis l’espace laissant le public plein d’interrogation lui donnant envie, lors de ce passage, d’observer ce qu’il se passe avec la plus grande attention.

3. Concrète

Pour que l’histoire soit efficace il faut qu’elle soit concrète et crédible. Ce qui est différent. Une histoire concrète est sincère, précise et consistante sans pour autant être dans l’explication mais plutôt dans la démonstration. C’est ce qui va lui permettre d’être retenue par le public. Une histoire concrète fait preuve d’empathie envers l’auditoire et lui faire comprendre que nous partageons la même expérience. Il est important de se demander quelle est la valeur ajoutée que l’on veut partager au public, quels interrogations peuvent-ils avoir, en quoi le sujet peut les concerner et pourquoi cela compte-il pour eux.

4. Crédible

En ce qui concerne la crédibilité, il faut comprendre par-là la réalité de l’histoire contée. Chaque univers contient ses propres lois physiques et chaque action doit alors se justifier. Il faudra trouver des arguments vraisemblables pour convaincre le public et rendre la cause convaincante.

5. Émouvante

“Parvenir à transmettre des émotions, c’est réussir à se mettre directement en lien avec ce que nous partageons tous de plus profond.” Guillaume Lamarre

Il existe une synergie entre nos émotions, elles sont dépendantes les unes des autres. Ainsi, la joie ne peut exister sans la tristesse, pour créer le soulagement il faut d’abord une dose d’angoisse. Un bon storytelling fonctionne comme un parcours qui conduit de l’empathie à la sympathie.

Ce sont les émotions qui permettent de transmettre, de convaincre et d’enseigner de la manière la plus effective. Arriver à les susciter n’est pas tâche facile. Le tout est d’éviter de faire de bons sentiments et de tomber dans la caricature.

C’est le moment de faire preuve d’empathie et de donner de l’attention pour recevoir de l’attention.

La structure narrative d’un bon storytelling

Afin de comprendre les rouages d’une bonne histoire, j’ai analyser une vidéo créée par une organisation américaine très populaire et qui réussit très bien dans le domaine nommée Charity: water.

Cette association sans but lucratif récolte régulièrement des dons qui servent à faire des puits et pompes à eau dans les régions du monde les plus pauvres. Son créateur Scott Harrisson avait travaillé dans le marketing et la gestion de réseaux sociaux pour des boites de nuits et a utiliser des outils normalement utilisées par des entreprises pour parvenir créer son association. Ainsi, Harisson, son équipe et les donateurs ont réussi à lever des millions de dollars à travers le monde faisant de Charity: water l’une des associations les plus connues du monde.

Vous pouvez visionner cette vidéo ci-dessous et activer les sous-titres français.

Voici le schéma narratif de cette histoire :


Il y a deux situations initiales. La première est une présentation du héros, Scott Harrisson, aujourd’hui qui nous présente son lieu de vie et sa famille. Cette première Situation initiale sert aussi à créer une boucle avec la situation finale.

Deuxième situation initiale : le héros est enfant et vit dans une petite maison de campagne avec ses parents. Le public est curieux de connaître le parcours du héros après avoir vu le contraste du décor avec la première scène.

Élément perturbateur : la mère tombe malade et ne peut s’occuper de sa famille.

Obstacles : Scott doit s’occuper des tâches ménagères très jeune et va même à l’église.

Climax 1 : à 18 ans Scott part vivre dans la grande ville de New York, rejoint un groupe de musique et devient promoteur de boite de nuit pendant 10 ans.

Crise 1, réalisation : lorsqu’il part en vacances en Uruguay pour faire la fête, il réalise qu’il est de moins en moins heureux, qu’il est dégouté par son quotidien et veut que cela s’arrête.

Décision : Il prend la décision de tout arrêter et de partir aider des personnes qui en ont besoin en tant que volontaire au sein d’organisation humanitaire.

Obstacles : aucunes organisations ne l’acceptent à cause de son passé et il doit remplir des tonnes de formulaire.

Ascension : une organisation l’accepte à condition qu’il paye une somme conséquente et le voilà parti au Liberia où il peut être photo-journaliste volontaire.

Crise 2, « plot twist » et désastre : Il découvre des gens avec d’énormes tumeurs les handicapants au quotidien et leur fait perdre leur sentiment de dignité. Il fréquente un docteur volontaire qui opère depuis plus de 20 ans. Un jour 5000 personnes se présentent pour se faire soigner mais le manque de personnel les oblige à rebrousser chemin. Enfin, Scott découvre que la population boit de l’eau sale responsable de maladies graves voir mortelles, que les femmes doivent aller chercher cette eau à des kilomètres les empêchant d’avoir accès à l’instruction.

Obstacle : les gens ne croient pas aux œuvres de charité.

Solutions, dénouement : Scott créer le modèle « 100% » qui consiste à donner la totalité des dons à la création des projets. Il ouvre un second compte et demande à des personnes ayant les ressources de payer pour les autres dépenses.

Il envoie des photos des projets aux donateurs, équipe les lieux de GPS pour pouvoir suivre leur progression en temps réel et équipe les pompes de capteurs pour voir si l’eau passe toujours et en quelle quantité.

Pour que les projets tiennent sur le long terme, il faut que les locaux les dirigent.

Pour finir l’association créera des publicités, des expositions, des événements et se servira des réseaux sociaux pour promouvoir leur message.

Message (situation finale) : les donateurs « abandonnent » leur anniversaire au profit de la cause. Les personnes dans le besoin ont accès à l’eau et ont plus de temps pour s’instruire. Donner pour Charity: Water c’est arrêter la soif dans le monde qui est un aussi grand pas en avant que la chute du mur de Berlin ou le premier homme sur la lune.

L’association lance un nouveau concept de levé de fond « The Spring » qui consiste en un abonnement pour recevoir des dons mensuellement.

L’histoire est SIMPLE: Elle raconte l’histoire d’un petit garçon issu d’un milieu modeste dans une petite ville qui devient le PDG d’une des plus grande association du monde à New York.

Elle est SURPRENANTE : Scott Harrisson va passer d’un homme superficiel à créateur d’une œuvre caritative.

Elle est CONCRÈTE : Scott explique son cheminement qui a l’air d’être donné à tout le monde.

Elle est CRÉDIBLE: il arrive à son but grâce au milieu et outils qu’il connait.

Enfin elle est ÉMOUVANTE : les images des personnes malades, voir les enfants boire de l’eau sale, écouter l’histoire de cette petite fille décédée brutalement avant d’atteindre son but de lever 300 dollars pour la cause et voir les enfants finalement jouer dans de l’eau propre et aller à l’école arrive à toucher le public et il est plus à l’écoute de la demande de don.

Il ne vous reste plus qu’a faire preuve de créativité pour créer votre histoire ! Dans un autre article, je parlerai de la notion d’empathie qui est si importante dans la communication avec son public.

N’hésitez pas à partager cet article et à en utiliser les images !

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